Objectifs de Développement Durable

L’abeille acteur du développement durable

Les abeilles jouent un rôle essentiel dans les écosystèmes européens. Ce fait est largement démontré par les chercheurs et bien diffusé dans les médias. Mais qu’en est-il pour une petite apiculture familiale en milieu tropical, sahélien, ou méditerranéen ? Comment l’apiculture peut être un élément de production économique participant pleinement à un développement durable, tout en : protégeant l’environnement, luttant contre la faim, la pauvreté et l’isolement, renforçant la résilience de la petite agriculture, donnant une opportunité de promotion sociale et limitant ainsi les migrations économiques ?

Les Nations Unies ont défini 17 Objectifs de Développement Durable (ODD) L’apiculture comme production de miel, mais aussi par ses implications amonts et ses répercutions en aval, répond à au moins 13 de ces objectifs. Par ailleurs, le PNUD salue l’action des abeilles sur un site dédié.

L’objectif général d’ApiFlorDev est de promouvoir l’apiculture familiale, source de revenus économiques, protégeant et valorisant la flore naturelle et cultivée, par un développement économiquement, humainement, et socialement durable.

Pour atteindre cet objectif général nous avons 6 objectifs spécifiques :

1 Apporter un revenu complémentaire par un petit élevage à part entière.

L’élevage des abeilles dans le combat contre la pauvreté. Contrairement à l’Europe où l’on considère l’apiculture comme une activité annexe, l’apiculture est pour de nombreux pays africains, asiatiques, centre et sud-américains, une activité qui participe pleinement à la production agricole. C’est un petit élevage sans terres, à la portée des habitants les plus pauvres, les plus déshérités. Cet élevage nécessite une petite formation et une bonne motivation. Bien conduit cet élevage est un moyen de lutter contre la pauvreté (ODD1).

Avec peu de moyens les abeilles butinent pour un revenu complémentaire. Les investissements en matériel individuel sont très faibles : quelques ruches fabriquées localement en bois, en terre cuite, en ciment, en fibres, en paille, dans des mûrs etc. complétées par un enfumoir, et un voile. La production est élevée en climat chaud, avec souvent plusieurs récoltes par an, ce qui ne nécessite pas des financements sous forme de prêts de campagne. Ces faibles investissements permettent pour un travail décent pour une bonne croissance économique (ODD8), et réduisent les inégalités (ODD10).

2 Assurer la sécurité alimentaire et une bonne santé

L’abeille mère nourricière. Le miel se conserve bien et renforce la sécurité alimentaire. Le miel est un aliment riche, apprécié des enfants. On peut élaborer des nutriments énergétiques que l’on conserve en cas de disette. Élément essentiel de la sécurité alimentaire, c’est un des moyens les plus performants pour lutter contre la faim (ODD2).

L’abeille infirmière naturelle. La santé des populations peut être améliorée par le miel qui est souvent considéré comme un médicament dans de nombreux pays. Il fait partie de la pharmacopée de la médecine traditionnelle. L’apithérapie peut être appliquée sur certaines maladies : ulcères, bronches, toux. Mais c’est surtout l’amélioration de la nutrition des enfants avec des compléments nutritionnels, qui est le principal facteur bénéfique pour la santé. Le miel est un médicament qui procure bonne santé et bien-être (ODD3).

3 Développer localement une petite filière apicole

  • L’abeille actrice du développement local. L’organisation est basée sur une production individuelle familiale avec 4 à 6 ruches. Une miellerie collective fixe ou mobile reste souvent l’investissement fédérateur. La collecte, le conditionnement et la commercialisation sont assurés par une petite coopérative ou association. Ainsi une famille, peut recevoir un revenu complémentaire significatif de l’ordre d’un demi-salaire de base local. L’apiculture familiale organisée réduit les inégalités (ODD10).
  • Les abeilles produisent des miels attrayants. Le miel de qualité est souvent bien valorisé sur le marché local, et encore mieux dans les grandes villes, les expatriés, les sites touristiques. L’exportation de miel vers l’UE sous forme de commerce équitable comme au Guatemala ou au Mexique est possible si le pays y est autorisé (réglementation des produits animaux). Cette commercialisation du miel résulte d’une consommation et d’une production responsable (ODD12).
  • Un artisanat innovant. La fabrication locale des ruches adaptées, des vêtements de protection, du petit matériel individuel, des enfumoirs, du matériel de miellerie, etc. demande de l’ingéniosité et de la débrouillardise pour réaliser ces équipements avec les moyens du bord en innovant pour une meilleure adaptation aux conditions économiques locales. Avec le miel il est possible de commercialiser des sous-produits : cires, hydromel et des produits dérivés : confiseries, pâtisseries, cosmétiques. Le matériel fabriqué localement, la valorisation des sous-produits, ne sont possibles que par l’innovation des artisans (ODD9), qui avec un travail décent participent à la croissance économique (ODD8).

4 Favoriser la promotion et la stabilité sociale

  • Les apiculteurs ou apicultrices sont des gardiens éclairés de la nature. La promotion sociale va de pair avec la pratique de l’apiculture. Il s’agit d’une activité qui demande un certain courage et une certaine sagesse, sources de reconnaissance. La formation indispensable se fait concrètement en rucher école où l’on peut nouer des liens et s’insérer professionnellement. A cette formation professionnelle doit être associées des formations générales, de gestion, de comptabilité, d’informatique, de langue et de prise de responsabilité. La pratique de l’apiculture impose de mieux connaitre le milieu naturel et de compléter son éducation (ODD4).
  • Depuis l’antiquité on sait que les abeilles sont un modèle d’éducation et d’émancipation pour des apicultrices. Les femmes et les filles d’agriculteurs qui exploitent habituellement les jardins créoles vivriers, peuvent y implanter quelques ruches et s’adonner à l’apiculture. Si elles savent dominer leur appréhension, elles peuvent acquérir ainsi une certaine émancipation et recueillir un revenu propre. Elles apprennent aussi à mieux nourrir leur famille, conserver les aliments, restructurer leur jardin et pratiquer une meilleure hygiène, évitant ainsi de nombreuses maladies. Elles peuvent aussi pratiquer des activités annexes et prendre de nouvelles responsabilités. L’apiculture contribue à une meilleure égalité entre les sexes (ODD5).
  • L’abeille citadine. L’agriculture urbaine se développe en périphérie des villes et participe à leur approvisionnement. L’apiculture urbaine est facilement praticable dans un petit jardin, sur un toit, un balcon…Elle apporte un complément nutritionnel et une petite activité de loisir et une certaine protection. Elle rend la ville plus sûre, plus résiliente, plus durable (ODD11)
  • L’apiculture facteur de stabilité sociale pour éviter les migrations collectives. La gestion des organisations apicoles même si elles sont plus modestes, nécessite les mêmes responsabilités, les mêmes formations et la même rigueur que les autres organisations agricoles. Elles peuvent être le tremplin vers la prise de responsabilités plus grandes notamment dans les domaines de la représentation professionnelle, du syndicalisme agricole, des fonctions électives ou représentatives. Dans leur pays où règne parfois un certain « désordre », les apiculteurs, les apicultrices peuvent jouer un rôle en matière de paix, de justice et d’institution efficaces (ODD16).

5 Développer l'agro-écologie

  • L’abeille une opportunité pour une diversification agricole: Par la plantation d’essences et la pratique de cultures mellifères, l’apiculture devient un facteur de diversification agricole. Avec un matériel similaire à celui des mielleries, on peut transformer ces nouvelles productions et les valoriser sous formes de produits associés : confitures, conserves de fruits, jus, etc. commercialisés avec le miel. La production agricole améliorée et diversifiée permet une lutte renforcée contre la pauvreté (ODD1)
  • L’abeille catalyseur de l’agroécologie. L’agriculture écologiquement responsable est facilitée par l’apiculture. Les abeilles par leur action pollinisatrice augmentent les rendements de nombreuses cultures arboricoles, maraîchères, vivrières en évitant des produits nocifs. Certaines cultures tropicales entomophiles se prêtent particulièrement bien à l’introduction de ruches tout en produisant des miels très recherchés : caféier, les agrumes, avocatier, manguier, goyavier, litchi, longane, papayer, cocotier, palmier à huile, et de nombreuses légumineuses solanacées, papilionacées, etc. L’introduction de quelques ruches dans les petites cultures familiales de café s’impose pour garantir une production stable et abondante et dissuader l’emploi de pesticides. L’apiculture incite à une production agricole responsable (ODD12).
  • L’abeille partenaire. Par son action pollinisatrice, elle augmente les rendements des cultures de rente A l’image de la production fruitière en Europe, il est possible de louer ses ruches sur des plantations et de dissuader ainsi l’emploi de pesticides pendant les floraisons. De même pour les plantations de couverture, d‘ombrières, de haies, de brise-vent, de banquettes de DRS, avec des essences mellifères, l’apiculture peut apporter rapidement une recette qui permet d’attendre des revenus indirects sur le long terme. Un partenariat planteur apiculteurs est doublement bénéfique et répond à l’ODD17 dernier mais probablement le plus nécessaire en agriculture.

6 Protéger l'environnement et la biodiversité

  • L’abeille est une sentinelle de l’environnement. La protection de l’environnement est renforcée par les pratiques d’agroforesterie. Les ruchers forestiers et la transhumance des ruches, évite en partie les feux de forêt et de brousse et dissuade de les allumer. Les arbres sur lesquels les abeilles viennent régulièrement butiner peuvent être préservés. Le maintien des arbres en place évite l’émission de CO2 (puits de carbone). Si ces effets directs sur le réchauffement climatique restent limités, Apiflordev peut aussi inciter les apiculteurs à modifier leurs pratiques apicoles et mieux s’adapter à ces changements pour réduire les effets négatifs sur l’écosystème, et contribuer en partie à la lutte contre les changements climatiques (ODD13).
  • Biodiversité « Le jour où l’abeille disparaitra, l’humanité n’aura plus que quatre ans à vivre » aurait pu dire Einstein. La mortalité des abeilles permet de détecter les pollutions et les pesticides et évite leurs applications. L’apiculture rends inutile la pratique de la cueillette du miel, avec destruction des essaims en forêt. L’élevage de reine limite les piégeages des essaims sauvages. Les abeilles sauvages servent de nourriture à certaines espèces d’oiseaux : guêpiers. Grâce à leur action pollinisatrice de nombreuses essences, elles préservent la biodiversité végétale en forêt, aux alentours des réserves et en milieu naturel. Elles assurent ainsi une meilleure production fruitière sauvage, source de nourriture pour de nombreuses espèces animales. L’apiculture protège la vie terrestre (ODD15).

Le financement de ces objectifs devrait être facilité : la question des abeilles est un sujet d’actualité en Europe. De nombreuses publications se consacrent à ce sujet, à leur disparition et au rôle que peut jouer l’apiculture dans la lutte contre les pesticides. Des collectivités locales et des entreprises se font installer des ruches sur leurs bâtiments. Cet engouement peut être un facteur favorable pour justifier des financements. Avec l’apiculture s’ouvre une opportunité de partenariat pour la réalisation d’objectifs (ODD17).

Par la multiplicité de ses réponses aux objectifs mondiaux de développement on peut simplement conclure que l’apiculture est un mode de développement agricole économiquement humainement et socialement durable.